Massacre au pont de No Gun Ri ---- Park Kun-woong et Chung Eun-yong

Chung Eun-yong, ancien policier et maintenant étudiant en droit, sa femme et leurs deux enfants vivent une vie normale et paisible dans une petite ville de Corée du Sud quand le 25 juin 1950, la guerre est déclarée entre les Corées du Nord et du Sud. Ils peuvent entendre des bruits de bombes dans le lointain et voient passer sous leurs fenêtres des files incessantes de réfugiés fuyant vers le Sud devant l'avancée des troupes nord-coréennes et malgré les communications rassurantes diffusées à la radio. Inquiets pour leurs enfants, ils décident de partir voir le frère de Eun-yong à Daejeon, plus au Sud, et ensuite rejoindre le reste de la famille dans le petit village de Joo Gok Ri. Le trajet est très difficile mais personne ne s'attend encore à vivre l'enfer qui va se déchainer dans les environs de No Gun Ri …

Si la guerre du Vietnam a été maintes fois abordées en films et en romans, me permettant ainsi d'en apprendre un peu plus, je ne connaissais strictement rien à la guerre de Corée, à part le moment approximatif auquel elle a eu lieu et que les troupes américaines y étaient impliquées. Mes connaissances sur le sujet se limitaient à ça ! Alors quand j'ai vu ce pavé à la médiathèque sur le sujet, je me suis dit que cela pourrait me permettre d'en apprendre plus. Et là, hou, la claque que je me suis prise ! L'album s'appuie sur le livre de Chung Eun-yong, qui a donc vécu les évènements et qui raconte un passage méconnu et longtemps resté caché de cette guerre. Je devrais même plutôt dire étouffé car le rôle des troupes américaines n'est vraiment pas beau. On peut même dire que c'est une honte et le mot n'est pas encore assez fort ! J'ai été outrée et écoeurée tout au long de ma lecture devant le comportement des troupes américaines et du coup, on comprend tout à fait pourquoi ils ont tenté d'étouffer l'affaire. Mais une enquête récente (qui a débuté au milieu des années 1990) a mis le tout en lumière. Avec un dessin typiquement asiatique et tout en finesse et en ombres, l'album commence tranquillement malgré l'exode de tous ces pauvres gens, ces familles qui essaient de fuir tant bien que mal les troupes nord-coréennes et la guerre. Je les comprends tout à fait. Mais on rentre dans le vif du sujet vers la moitié de l'album quand Eun-yong qui a du quitter sa famille pour se mettre à l'abri (les hommes pouvaient être plus vite soupçonnés de collaborer avec l'ennemi du Nord) retrouve sa femme blessée dans un camp américain de réfugiés et où elle lui raconte ce qui s'est déroulé au pont de No Gun Ri, quand les troupes américaines ont attaqué pendant plusieurs jours les réfugiés qui avaient été obligés (par les militaires américains !) de quitter leur village. Ce fut un vrai massacre et même si je ne suis pas sensible aux descriptions sanglantes, j'avoue que j'ai souvent eu du mal lors ce récit. Déjà, parce qu'il s'agit d'un fait qui s'est réellement passé et que cela a du être un cauchemar pour ces gens. Je n'arrive même pas à imaginer comment les survivants ont pu se remettre de ces horreurs (enfin, apparemment, ils ne s'en sont toujours pas remis!). Page après page, on voit des familles entières se faire massacrer froidement, des gens souffrir. Heureusement que le dessin est en noir et blanc car cela aurait carrément été insoutenable ! Lors de ma lecture, j'étais aussi perdue que ces pauvres gens : pourquoi les Américains leur tiraient-ils dessus ainsi, de façon aussi acharnée ? Aucune justification ne peut être prise en compte pour leurs actions. Ce fut donc une lecture éducative mais très dure et difficile au niveau émotionnel et psychologique. Il semble qu'il y aura un deuxième volume au sujet de la guerre de Corée mais je pense qu'il abordera un autre évènement ou bien qu'il parlera de la lutte des survivants pour se reconstruire et pour obtenir justice. En tout cas, je le lirai le jour où il paraitra !

Les avis de Mo, Choco, Jean-François.