Karoo ---- Steve Tesich
Saul Karoo vient de rentrer dans la cinquantaine, est séparé de sa femme depuis plusieurs années sans qu'ils se décident vraiment à divorcer et leur fils adopté vient de rentrer à Harvard mais Saul n'arrive pas à se sentir proche de lui et à agir comme un père normal. Son travail de consultant en scénario, qui consiste à réécrire les films qui ne paraissent pas prometteurs, lui rapporte un revenu confortable mais Saul Karoo n'est pas heureux. Lors de la fête de Noël 1990 chez des amis, Saul se rend compte encore une fois qu'il n'arrive plus à se souler, quelle que soit la quantité d'alcool avalée mais pour ne pas décevoir son entourage qui s'attend à le voir ivre, il joue le jeu de l'ivrogne habituel. Et quand il a rendez-vous avec Jay Cromwell, un gros ponte d'Hollywood qui lui donne souvent du travail mais qui est un être dénué de toute humanité, il se promet de lui dire ses quatre vérités et de ne plus accepter les réécritures qu'il lui propose. Mais lors du repas, Saul n'arrive pas à s'affirmer, trouvant plus facile de continuer à jouer le rôle attendu par les autres …
Après avoir beaucoup entendu parler en bien de ce roman sur la blogosphère, c'est à mon club lecture que ce titre est à nouveau revenu depuis peu sur la devant de la scène, me rappelant que je l'avais noté. J'ai donc enfin pu me lancer dans cette lecture racontant la descente aux enfers, la déchéance d'un homme sans repères. Le départ m'a paru très prometteur car Saul Karoo, malgré de nombreux défauts, a aussi beaucoup d'humour et d'auto-dérision, le rendant ainsi attachant. Ses névroses, ses défauts m'ont paru assez typiques de l'époque et du milieu dans lequel il gravite, le milieu du cinéma, assez superficiel, sans humanité, axé sur le profit et le succès. Il n'a aucune estime de lui-même, n'agit qu'en fonction des autres et de ce qu'ils attendent de lui, il apparaît parfois sans coeur mais beaucoup de ses attitudes peuvent être compréhensibles car il choisit toujours la voie de la facilité, quitte à blesser les gens qui l'entourent et qui l'aiment. Mais j'avoue qu'il m'est aussi parfois arrivé de choisir la solution la plus simple par facilité (mais sans blesser les autres) donc son attitude m'est souvent apparue comme humaine. On découvre donc ce personnage hors norme pendant la première partie du roman, puis un rebondissement survient, qui va lancer Saul Karoo dans une mission qu'on sent bien dangereuse pour un certain nombre de personnes de son entourage. J'ai trouvé que c'était intéressant car je voyais tout à fait où l'histoire allait et que j'avais envie de lui dire d'arrêter car cela ne pouvait que tourner mal ! Mais ses motivations semblent tellement partir d'un bon sentiment, sans intention de faire de la peine à qui que ce soit, que cela est d'autant plus tragique. Par contre, je commençais quand même à ressentir une espèce de lassitude dans la répétition des travers de Saul. Le coup de grâce est arrivé à la fin, à laquelle je n'ai pas du tout adhéré, la trouvant trop philosophique, trop axée sur des réflexions existentielles à mon goût, même si elles sont là pour expliquer plus en profondeur tout ce qui s'est passé dans le roman et que la conclusion est plutôt originale. Du coup, cette lecture qui avait plutôt bien commencé a un peu fini par me lasser pour me laisser carrément sur une sensation d'inachevé au final.