Wilderness ---- Ozanam et Bandini d'après Lance Weller

1899, côte Nord-Ouest des Etats-Unis. Abel Truman, un ancien soldat confédéré, s’est installé avec son chien dans une cabane face à l’océan. Quand le vieil homme ne chasse pas ou ne se promène pas dans les bois ou sur la plage, ses journées sont essentiellement contemplatives, avec des moments de la Guerre de Sécession lui revenant en mémoire mais aussi des souvenirs de plus en plus flous de sa vie passée avec sa femme et la naissance de leur bébé. Mais alors que les jours passent sans heurt, un groupe d’hommes rencontré par hasard lors d’une de ses balades lui propose d’acheter son compagnon à quatre pattes pour organiser des combats de chien, offre qu’Abel décline bien évidemment mais les hommes ne comptent pas s’en tenir à ce refus …

Je n’ai pas lu le roman de Lance Weller bien que j’en ai entendu beaucoup de bien et que je l’avais noté pour une lecture plus tard mais comme je suis tombée sur son adaptation en BD à la médiathèque, je n’ai pas trop hésité (surtout que j’avais hésité à l’acheter). Et puis, si je n’aime pas voir les adaptations en film ou série avant de lire un roman, lire une adaptation en BD avant le livre me dérange beaucoup moins. J’avais donc une idée assez précise du thème de l’histoire avant de commencer cette lecture. Je savais qu’il allait y avoir des flashbacks avec des souvenirs de la Guerre et de la terrible bataille de Wilderness à laquelle a participé Abel et j’ai trouvé que les auteurs de l’album s’en sont très bien sortis à ce niveau-là : si le récit se déroulant en 1899 est en couleur, souvent assez sombre, les souvenirs sont en noir et blanc avec de toutes petites touches de couleur quand c’est nécessaire ou pour souligner des choses marquantes. On ne se perd donc jamais dans les époques, même si l’alternance de ces deux périodes étant plutôt rapide et fréquente, cela peut être perturbant dans la lecture, obligeant à se recaler à chaque fois mais on peut supposer que c’est aussi ce qu’Abel ressent, en proie constamment à ses souvenirs alors que sa santé se détériore. Et comme tous les souvenirs, ceux-ci fonctionnent de façon étrange, sans continuité entre eux, sautant d’un épisode de la vie à un autre, et là aussi, cela ne facilite pas la lecture. Je dois dire que cela n’a pas été facile de ne pas décrocher : je pense qu’en roman, la vitesse de lecture étant plus lente, cela doit être moins perturbant, moins haché, alors qu’en BD, en lisant plus rapidement, on n’arrête pas de changer d’époque et de contexte ! Abel est un personnage attachant et comme il protège son chien tout en râlant souvent contre lui, il m’a encore plus plu ! Mais bien sûr, le récit va vite se transformer en poursuite, toujours rythmée par les flashbacks, qui permettent de mieux cerner Abel et qui explique aussi comment il est arrivé là, un solitaire face au Pacifique. Les conditions de soldats pendant la Guerre de Sécession est bien sûr abordé de façon juste car on ressent bien toute l’horreur vécue et après lu Lignes de Front, cela a été d’autant plus marquant pour moi. On y retrouve aussi les relations avec les Indiens, qui va s’avérer importante, mais on découvre aussi, à certains moments, plusieurs personnages anciens esclaves en fuite ou bien devenus libres à la fin du conflit qui, bien que secondaires, n’en sont pas moins essentiels au récit. Le graphisme est anguleux, dans un style un peu brouillon comme je les aime, avec des personnages bien expressifs (même le chien l’est !). J’ai trouvé que la psychologie d’Abel et son parcours intérieur étaient très intéressants mais j’avoue que je me suis un peu perdue dans la conclusion finale qu’il a fallu que je relise deux fois en revenant en arrière pour bien identifier les protagonistes impliqués et le déroulement des évènements ! Une lecture exigeante mais passionnante !

L'avis de Mo.