Cauchemars ex machina ---- Thierry Smolderen et Jorge González
Le 22 septembre 1991, à Paris, le corps de l’écrivain Corneille Richelin est découvert dans son bureau fermé à clé de l’intérieur et une hache plantée dans son front et surtout tout seul. Il s’agit manifestement d’un meurtre mais celui-ci semble inexplicable car les policiers se retrouvent devant un cas de chambre close. Pour tenter de l’élucider, il faut remonter dans le passé de Richelin, quand celui-ci avait publié quelques romans policiers au succès confidentiel et s’inspirant des cauchemars qui agitaient toutes les nuits et qu’il s’empressait de noter à chaque réveil. En 1938, il est pourtant parmi les invités du baron von Richtenbach qui a réuni dans la capitale française ceux qu’il considère comme les meilleurs auteurs de romans policiers du moment. Parmi le groupe, il y a l’anglaise Margery Allingham et le belge Stanislas-André Steeman et Margery s’empresse, au cours de la conversation, de sonder leur invité au sujet des intentions d’Hitler concernant une possible guerre. Il faut dire que la dame travaille occasionnellement avec les services secrets britanniques et que le baron est le neveu de l’homme à la tête de l’industrie d’armement du Reich …
Mon résumé est déjà bien long et pourtant, il ne couvre que le début de l’histoire ! Je n’avais aucune idée de son sujet avant d’entamer ma lecture … c’était juste un one-shot disponible à la médiathèque et le titre était plutôt accrocheur. En plus, j’aime bien le scénariste Thierry Smolderen car les quelques albums que j’ai lus de lui sont toujours assez originaux. Ici, il y a un mélange de personnages réels, comme l’auteure Margery Allingham ou Cameron McCabe (de son vrai nom Ernst Bornemann) et de personnages totalement fictifs comme Corneille Richelin ou le baron von Richtenbach et il évoque aussi des évènements historiques ayant réellement eu lieu. Du coup, tout le mélange de vrai et de faux permet de bâtir un récit assez crédible, tant dans ses bases que dans son déroulement. Cela ressemble donc à une histoire policière, avec des meurtres improbables (parce que Richelin ne sera pas le seul) mais aussi une histoire de manipulation par temps de guerre avec un côté d’espionnage, ainsi qu’un récit un peu historique (même s’il reste fictif dans sa quasi-totalité), le tout sur fond de mystère et de psychologie des personnages (parce que ce dernier aspect est à prendre forcément en compte dès qu’il s’agit de manipuler les gens). J’ai trouvé l’ensemble vraiment intéressant car cela aborde de nombreux thèmes (les romans policiers avec des clins d’œil au genre, la réalisation d’un film, les méthodes de renseignement en temps de guerre et comment fournir de fausses informations, les motivations des Allemands avec toutes leurs croyances dans le passé aryen, les relations amoureuses …). Là où j’ai quand même eu du mal, c’est avec le dessin. Je trouve que le style colle parfaitement bien à l’époque, avec un aspect épuré et sobre, des couleurs très neutres et froides et une découpe classique (avec une découpe du récit par chapitre, que j’ai bien appréciée) mais j’ai eu souvent du mal à différencier les personnages, qui étaient bien trop similaires à mon goût (franchement, Richelin et le baron se ressemblent beaucoup). A part ce petit bémol, ce fut une lecture très agréable avec un récit original bien retors et au final étonnant !
L'avis de Meséchappéeslivresques.