Jimmy Corrigan, the smartest kid on Earth ---- Chris Ware
Dans la région de Chicago, Jimmy Corrigan, trentenaire célibataire, a beaucoup de mal à socialiser avec les gens. Une mère omniprésente qui l'appelle au téléphone constamment, un travail banal où ses collègues semblent à peine le remarquer, une vie quotidienne solitaire et sans surprise, voilà tout ce qui fait de Jimmy un homme triste et dépressif. Mais un jour, il reçoit une lettre du père qu'il n'a jamais connu et qui l'invite à venir le voir dans la petite ville où il vit et le voilà plongé dans son histoire familiale à la découverte de ses origines …
J'ai tout d'abord été attirée par le format à l'italienne et l'originalité de cette bande dessinée (ici, je devrais plutôt parler de roman graphique) qui commence déjà avec la couverture. L'auteur s'amuse à nous "vendre" l'ensemble avec un mode d'emploi, des conseils de lecture et des montages à réaliser pour recréer en 3D l'univers de Jimmy. Le graphisme très simple et les couleurs froides utilisées me plaisaient aussi beaucoup, de même que les variations du sens de la lecture (il est nécessaire de parfois tourner l'album pour lire). Mais j'avoue avoir galéré pendant une bonne centaine de pages (l'album en comporte 380), me perdant dans l'histoire et les rêves de Jimmy. Il faut dire que l'histoire mêle souvenirs d'enfance de Jimmy, de son père (heu, je ne suis même pas sûre sur ce coup-là !), de son grand-père (dans le Chicago du fin 19ème - début 20ème siècle) à la vie actuelle de Jimmy auxquels s'ajoutent des rêves et des délires. Cela n'a pas été très facile au départ et je n'avais aucune idée d'où j'allais ! Les ressemblances entre certains personnages (entre autre entre Jimmy et son père) m'ont aussi perturbée car je n'arrivais pas toujours à les différencier et j'étais encore un peu plus perdue ! De même, l'auteur emploie un bon nombre de métaphores visuelles pour décrire les sentiments qui habitent Jimmy (par exemple la béquille qui est là pour souligner le désarroi affectif). Mais l'histoire familiale est devenue de plus en plus nette au fil de ma lecture et il est difficile de ne pas s'émouvoir pour le pauvre Jimmy, qui semble enfermé dans son monde clos abandonné de tous. L'auteur déclare que cette œuvre, parue d'abord sous la forme d'un feuilleton hebdomadaire dans une revue, a été librement inspirée de sa propre vie et de ses relations avec son père. Une lecture pas vraiment facile mais que je suis heureuse d'avoir mené jusqu'au bout (l'émotion grandit au fur et à mesure de l'histoire), un album soigné et original mais à lire dans de bonnes conditions d'éclairage : c'est écrit vraiment petit parfois (ou alors c'est moi qui me fait vieille !).
Roaarrr Challenge : Fauve d'Or, Alph-Art du meilleur album 2003 - Will Eisner award, meilleur album (matériel réédition) 2001 - Grand prix de la critique ABCD 2003.