Tomahawk ---- Patrick Prugne

Fort Carillon, vallée de l’Ohio, juin 1758. La Guerre de Sept Ans entre la France et l’Angleterre a commencé il y a deux ans et oppose les deux pays sur les territoires américains. Les deux nations utilisent les services de différentes nations amérindiennes et au Fort Carillon, des patrouilles parfois aidées par les guerriers Abénaquis surveillent l’avancée des troupes anglaises et redoutent plus particulièrement les patrouilles écossaises armées par les Highlanders sans pitié. Mais pour Jean Malavoy, ce ne sont pas ces menaces qui l’intéresse. En couple avec Abéqua, le frère de celle-ci apprend à Jean au retour d’une sortie de chasse dans la forêt qu’il a vu le grizzly énorme qui obsède le Français, qui n’a qu’une idée : se venger en le tuant. Bien qu’il soit de patrouille, Jean, malgré les conseils du prêtre du fort qui le connaît bien et qui lui dit qu’il va être considéré comme déserteur, décide de partir à la recherche du plantigrade …

Lire un album de cet auteur est toujours un régal pour les yeux ! Je suis une grande fan de son style graphique, de ses aquarelles créant de superbes décors aux couleurs lumineuses, de ses personnages toujours soignés et inspirés de documents d’époque, même s’ils sont purement fictionnels. Seul le contexte historique est réel avec le Fort Carillon et la guerre entre Français et Anglais (en fait je devrais dire Britanniques !). Le travail sur le dessin, les tons employés, le rendu des paysages, le découpage, tout est parfait et dénote une grande maitrise. L’histoire est aussi à la hauteur du graphisme. Après une incursion vers les îles du Pacifique avec Vanikoro, l’auteur revient à ses premières amours : le Nouveau Monde, les différentes nations européennes qui s’y installent et les modifications des conditions de vie des Amérindiens. Ici, même si la guerre est omniprésente sous forme d’escarmouches, le récit se concentre principalement sur la confrontation entre Jean Malavoy et le grizzly, entrainant l’homme dans la forêt où les dangers ne se limitent pas aux bêtes sauvages. Cela évoque forcément Moby Dick dans l’obsession humaine vis à vis d’un animal puissant et violent. Mais on voit aussi comment les Amérindiens sont utilisés pour servir les nations en guerre, comment certains soldats se sont rapprochés des guerriers, apprenant leurs techniques de chasse et de pistage. Les personnages sont montrés tels qu’ils sont : parfois bons et parfois mauvais, avec toujours une touche plus brute, plus animale, qui est souvent contrôlée par la raison et le sentiment d’humanité. Comme souvent avec les albums de cet auteur, j’ai trouvé l’ensemble trop vite lu car on aimerait rester encore un peu avec les personnages, sillonner ces beaux décors mais on le sait bien : les meilleures choses ont toujours une fin ! Et celle-ci m’a paru très satisfaisante !