Toutes les morts de Laila Starr ---- Ram V et Filipe Andrade

Bombay, un jour de fin décembre. Madame Shah est bloquée dans le trafic alors qu’elle est sur le point d’accoucher d’un petit garçon Darius. Pendant ce temps, les étudiants en média et communication de la promo 2019 organisent une dernière fête au cinquième étage d’un immeuble avant de plonger dans la vie active. Parmi les invités, il y a une jeune femme, Laila, qui semble détachée de l’ébullition ambiante. Parallèlement, bien au-delà des nuages et la vie terrestre, la Mort est convoquée au dernier étage de la tour argentée : son chef, l’incarnation divine de toutes les bonnes choses, lui signifie son congé. La raison en est simple : Darius trouvera le secret de l’immortalité dans plusieurs années et elle n’est donc plus utile et va être envoyer sur Terre. C’est le moment que choisit Laila pour sauter dans le vide …

Avec cette couverture, on se doute tout de suite qu’il va y avoir un rapport avec l’Inde, vu le nombre de bras du personnage. Et on se doute aussi que l’ensemble va être très coloré ! C’est d’ailleurs la première chose qui saute aux yeux : une débauche de couleurs acidulées mais assez douces et un graphisme qui me rappellerait un peu celui de Cyril Bonin, avec des traits fins et des visages un peu anguleux par moments. Le dessinateur est né et a vécu en Inde jusqu’à sa majorité mais vit maintenant à Londres et je trouve que son style est assez européen, alors que ce titre est d’abord sorti sous forme de comics aux USA (tout en étant loin du style graphique habituel pour ce genre). Malgré tout, on n’a pas de doute : on est bien en Inde et l’ensemble est imprégné de la culture de ce pays, avec les références à ses dieux et une façon de voir la vie et de vivre qui est un peu différente de celle des pays occidentaux. Et pourtant, le scénariste est lui Portugais donc l’ensemble mixte des inspirations variées ! Le thème du récit est, vous l’avez compris, est la vie et la mort et les relations qu’on peut tisser avec les autres. La déesse de la mort se retrouve dans un corps mortel mais pas vraiment car elle a un ami proche parmi les dieux et celui-ci la ramène à la vie s’il lui arrive un accident, d’où le titre. Par contre, le principe de départ m’a paru un peu bancal car si la mort est mise au chômage dès le début de l’histoire, comment son nouveau corps humain peut-il mourir ? D’ailleurs, même si elle a été renvoyée, cela n’empêche pas les gens de mourir … il y a un truc qui m’échappe dans le raisonnement des auteurs sur leur postulat de départ mais bon, j’ai fini par passer outre ce problème pour me plonger dans le parcours de Laila et celui de Darius, qui n’est jamais loin car la Mort veut récupérer son job et doit donc se débarrasser de celui qui permettra l’immortalité … à part que ce n’est pas si facile et les sentiments se mettent en travers de sa quête. J’ai fini par m’attacher aux personnages remplis de failles et de doutes et la lecture est remplie d’émotions, surtout vers la fin (avec un petit rappel philosophique sur la vie). J’ai vraiment trouvé l’ensemble original et très agréable à lire !